Quel crime tu n’as pas commis plutôt ! Enfin, je dis ça, j’exagère un poil, mais il faut dire que tu as mis la barre très haut, dangereuse louve que tu es. Tu étais celle qui rameutait des meutes. Organisait des crimes comme un fin chef d’orchestre, pour exaucer les vœux des plus riches. Enfin, ça, c’est ce qu’ils pensaient. Bizarrement, la vérité semble plus complexe. Beaucoup de morts dans ton sillage. Que des gens qui ne manquent à personne. Un service rendu à la société, dans un bain de sang, permettant à des crapules moins horribles, si on peut le dire comme ça, de s’élever dans cette sombre marre qu’est le monde de l’ombre.

Dans cette ombre, tu y es restée longtemps, sans vraiment laisser les autorités apprendre ne serait-ce qu’une chose à ton propos. Beaucoup ont cru que tu n’étais qu’une légende finalement. Un mythe fait pour ne pas remonter jusqu’aux véritable commanditaires. Et c’est pas totalement faux dans un sens. Tu étais le brouilleur. Un loup, menant sa meute avant de disparaître, encore et encore pour un nouveau projet. Tu as même dû dévoiler ton nom à ton procès. Il n'en avait aucune foutue idée ...

Alors on aurait pu t’accuser de trafique d’armes, d’enlèvement, de séquestration, de torture, d’homicides volontaires sur de jolies crapules, de braquages, de fraudes, commanditées ou non ... Mais tu es tombée pour un crime précis. Le seul pour lequel il y avait des preuves. Une erreur de parcours ? Certains pourraient ainsi la percevoir mais ... toi, tu appelles ça ton plus beau coup ! La meilleure manière de quitter la terre pour l’enfer !

Un homicide volontaire. Brutal. Froid. Tu as été retrouvée dans cette chambre d’hôtel, couverte de sang, attendant patiemment sur le fauteuil, de velours pourpre couvert, un sourire paisible aux lèvres, le corps allongé d’une femme au sol, la jugulaire ouverte d’un stylo plume, demeurant dans une flaque béante de son propre sang. Tu te souviens bien des flics, se figeant face à ce spectacle macabre, alors que tu leur balançais un large dossier papier, couvert du sang de ta victime.
Gina Zanetakos.

Ah, quelle horrible créature. Le diable sous le masque d’un ange. Elle aimait, se donner des grands airs. Battre de ses longs cils et rire, un verre de champagne à la main tout en se faisant mousser. Une grande dame du beau monde. Présidente d’une association sauvant des femmes des trafiques d’êtres humains. Ah ! La bonne blague. Une hypocrite, cachant son trafique sous une association censée lutter contre. Utiliser l’argent des quelques riches naïfs de ce monde pour continuer de s’en mettre plein les poches. Elle a même demandé l’assassinat de son propre époux pour se faire martyre. Quand on dit que le diable s’habille en Prada ... Ce n’est pas si loin de la vérité.

L’idiote a eu le malheur d’essayer de de faire bosser pour elle. Pire, elle a tenté cela sous la menace. Ah ! C’est ce qui aura précipité sa chute. Elle a voulu jouer à l’alpha et y a perdu sa gorge.

Tu as pris grand plaisir à tout noter. La moindre de ses petites combines. Ses aller-retour. Toutes ces transactions frauduleuses. Oh, tu en as menacé des gens pour ça ! Et quand ils rejoindront Overwolrd à leur tour, tu te feras un plaisir de les remettre sous tes crocs.

La réputation de Gina Zanetakos a été ruinée. Son empire détruit. Sa ... cargaison ... a retrouvé sa liberté. 67 femmes, enfermées dans un conteneur cargo.

Ton procès a été ... expéditif. Aucun doute sur ta culpabilité. Pourtant, il y a eu une hésitation chez les jurés. Cette petite voix murmurant à leur oreille que finalement, tu avais peut-être fait une bonne action avec ce meurtre.  

Finalement, tu as été condamnée à l’Overworld. Un départ en toute beauté ! Ah, que tu as souris à ton procès comme si tu étais heureuse d'aller dans un enfer éternel ! Parce que au moins, tu as été utile. Et maintenant, la société t'ouvres un nouveau terrain de chasse où tu comptes bien montrer que tu es une alpha.

Tu es née dans le froid du Nord de la Suède, près de Kiruna. Maman était une scientifique, travaillant à la base secrète de recherche sur la manipulation génétique. Une femme charmante. Un peu obsessive avec ton travail, mais gentille. Elle aimait rire. Beaucoup. Du moins, dans les rares moments qu’elle passait à vos côtés. Papa, lui, était un instituteur, tout à fait banal. Un homme calme, toujours le visage décoré d’une petite barbe de trois jours, bien entretenue, avec ses cheveux roux bouclés sur le haut de sa tête et ses lunettes. Calme, mais froid, comme la toundra. Une dualité dans sa personne, que tu ne questionnais pas, quand tu étais encore toute petite. Avec ta mère, il était toujours doux. Le père parfait par définition. Prêt à tout pour ses deux petites filles. Affectueux Pourtant, quand elle n’était pas là, il était juste ... désintéressé. Comme si d’un coup, vous n’existiez plus. Ou plutôt, comme si vous n’étiez que des accessoires.

Les années ont passées, petit à petit. Tu étais une enfant curieuse, là où ta sœur ainée, Hanna, était plus docile. Tu fouinais. Suivais, sans un bruit. Ton père t’a attrapé, un jour, le suivant dans les rues discrètement sur ton petit vélo du haut de tes 10 ans jusqu’à ce garage, en centre-ville. Tu l’as vu, se défouler comme une bête sur ce sac de frappe. Habile, rapide. Terrifiant. Et c’est sans surprise qu’il t’a attrapé, comme armé d’un sixième sens Et pour la première fois, il a semblé avoir un véritable intérêt en toi. C’est peu après cela que tu as commencé à passer du temps avec lui. À l’époque, tu étais juste contente de passer du temps avec lui. C’était comme un jeu. Mais maintenant, tu sais la vérité : c’était un entrainement. Les prémices d’une transformation irréversible.

Petit à petit, papa a construit une arme. C’était votre petit secret à vous. Tu as commencé à bien te débrouiller. Oh, oui, tu étais douée et c’est pour ça qu’il avait décidé de t’accorder une chance ! Mais rien ne t’avait réellement préparé à la réalité cachée derrière toutes ces étranges choses qu’ils faisaient.

Tu venais à peine d’avoir tes 13 ans. Dans le petit salon familiale, la radio laissait entendre un vieux titre d’Alice Russel tandis que sur l’échiquier, les pions claquaient, rapidement, sèchement. Une danse de blanc et de noir. Une opposition brutale, cruelle, froide derrière un simple jeu. Ta sœur, elle, s’occupait de ses poupées, un doux sourire aux lèvres, sans vous prêter attention. Et puis une explosion, brutale, qui a tout soufflé. Les débris des murs qui ont volé, partout. Ton petit corps, projeté violement contre une armoire. La douleur vive s’emparant de tes cotes. Les cris des forces militaires suédoises, armées jusqu’aux dents et prêtes à vous dévorer. Un nom crié. Celui de ton père. Des accusations. Un visage qui devient celui d’une bête. Et encore une fois, tout s’est enchaîné si vite. Des coups de feu. Des corps qui tombent, tout autour de toi, rejoignant celui d’Hanna, allongé au sol sous les gravats, le crâne couvert de sang. Ton père qui t’attrape sous son bras, comme un vieux sac, ses ennemis éliminés, sa main libre sortant un vieux téléphone prépayé.

« Agent Asterope demande une extraction immédiate pour deux agents ! Rendez-vous au point Tango 2 6 Delta ! »

Et oui, un espion. Comment tu aurais-pu deviner que ton existence même n’était que la conséquence d’une mission d’espionnage ? Rentrer dans la vie d’une chercheuse, se rapprocher d’elle, l’épouser, tout ça pour avoir accès à ses données. C’était ça, la cruelle réalité de ta naissance. Ta sœur et toi n’avaient été qu’un moyen de renforcer la confiance entre lui et sa cible, pendant toutes ces années. La seule raison pour laquelle tu avais survécu, c’était ton talent pour apprendre, vite, hérité de tes géniteurs, sans doute.

Et à partir de ce jour, vous avez disparu, sans laisser de trace. Vous êtes devenus des fantômes, sur lesquels on ne sait que quelques rumeurs, douteuses. Réhabilités dans les rangs des forces grecques, d’où ton père était originaire, pour un jour être de nouveau envoyés en mission. Enfin, ça, c’était le plan. Pendant deux an, vous avez gardé la tête basse, pendant que l’agent Asterope préparait une nouvelle de ses petites escroqueries, cette fois, contre ceux même qui l’avaient formé.

Ton père était une bête assoiffée de pouvoir, trop longtemps tenue en laisse par des bureaucrates feignants.  Alors, il a mordu la main qui l’avait nourri toutes ces années, sans la moindre hésitation. Un nouveau drame, et encore une fois, il vous a fait tout recommencer. Une nouvelle vie, faites de voyage. Ton père a vendu ses informations au plus offrant. Engager sa propre équipe, construite au fil de ses missions, pour se faire connaître comme la meute du nord. Une brigade spécialiste des actions armées en tout genre. Cambriolages, braquages, évasions ou bien meurtres. Oh, tant qu’il y avait de l’argent à se faire, il acceptait la tâche sans broncher ! Et toi, tu as continué de grandir comme ça. Au milieu de cette violence. Tu es devenue le produit d’une guerre continuelle d’informations et d’argents, sans vraiment connaître d’autres choses.

Alors pourquoi ça t’a autant dérangé, au fond de toi ? Tu aurais dû ne rien ressentir. Aucune empathie, comme lui. Être un gentil louveteau, obéissant à l’Alpha, agissant pour le groupe. Pourtant, il y a toujours eu cette colère, tapie au fond de ton petit cœur d’enfant émietté. Un brasier grandissant à chaque innocent victime des agissements de la meute.  Peut-être parce que tu as toujours su au fond, que tu n’étais qu’un outil à ses yeux ? Un simple soldat, manipulable et remplaçable, comme les autres.

Et ce brasier devait bien un jour devenir incendie.

Une évasion commanditée dans l’une des prisons secrètes américaines, placée au beau milieu de l’océan Indien. Le plan été clair : Surcharger le serveur central en utilisant la chaufferie en mode manuel, pour finalement faire s’ouvrir toutes les cellules. Évacuer la cible, en arrêtant tout ennemi sur votre chemin, profitant du chaos, avant de monter au bord d’un hélicoptère atterrissant à 11h07 précisément. Et rien ne s’est passé comme prévu.

Vous avez été dépassés, plus vite que prévu. Les alarmes, criants dans les longs couloirs métalliques, vous fracassaient les tympans. Votre cible, blessée, ne faisait que se trainer, vous empêchant d’avancer au rythme parfait et à vos trousses, les chiens du gouvernement américains courraient, prêts à vous dévorer, comme une bonne partie de votre équipe, déjà tombée. Et c’est là que tu l’as vu. La main de ton père, se poser sur son arme. Son regard froid, glissant sur toi. Tu as vite compris. Tu allais être sacrifiée. Une brebis laissée là, au milieu du chemin, pour ralentir ses poursuivants.